ALTEO SES DÉCHETS – RÉALITÉS.

3 Sep

A l’unissons la presse aux ordres et l’industriel annonce un grand succès : la qualité des rejets en mer sont aux normes pour 5 éléments ce qui est très peu au regard des 82 restants. Les résidus de la station de traitement seront mis en décharge à ciel ouvert à Mange-Garri sans aucune précision sur la présence d’éléments toxiques.

5 paramètres étaient concerné, trois arsenic, fer, aluminium correspondaient déjà à la norme et deux DCO et DBO 5 après maints report sont dans les « clous « au 31/08/2020.

Suivant détail ci-dessous 82 polluants sont encore présents à ce jour sans que cela dérange quiconque ?

Le texte en synthèse du professeur d’Etat Henry Augier :

« Une fois de plus, l’entreprise Alteo a le culot de se féliciter de réduire l’empreinte environnementale de sa vieille usine d’alumine de Gardanne ! Comment est-il possible de se décerner un tel satisfecit !En réplique, voici quelques informations qui placent cette usine et cette firme comme un des exemples de pollution industrielle les plus scandaleux de notre pays.

Boues rouges.

 De 1966 jusqu’au 31 décembre 2016, l’usine a rejeté environ 20 millions de tonnes de boues rouges, peut-être plus, dans le canyon de Cassidaigne, au large de Cassis.

Est-il seulement possible de se représenter, d’imaginer ce que cela représente comme masse gluante, épaisse, toxique déposée au fond de la mer !

Base de 270 m3/heure, déversement journalier de 775 tonnes de matières boueuses :

64 tonnes d’aluminium, 270 t de fer, 42 kg d’arsenic, 80 g de mercure et d’un foule d’autres produits toxiques pour la vie marine.

Rejetées pendant 50 ans ces boues rouges s’étalent, sur les fonds, au large, depuis Toulon jusqu’au golfe de Fos  soit 2500 km2;

Toutes les espèces vivant sur le fond ont été recouvertes, intoxiqués, ensevelies à jamais. C’est un enterrement de première classe et une perte biologique considérable.

Rejets décolorés.

 L’utilisation de filtres presses permet à l’industriel de séparer deux fractions des boues rouges : une partie boueuse et une partie liquide.

La fraction boueuse est déposée à terre à Mange Garri dont une partie en bauxaline. La fraction liquide décolorée est rejetée en mer au même endroit et par la même canalisation que les boues rouges.

D’après l’industriel, la bauxaline serait dépourvue de produits toxiques, cela signifie-t-il que les polluants des boues rouges se retrouvent tous dans le rejet décoloré ?

L’industriel lui-même a donné une liste des polluants contenus dans ces effluents sortant des filtres presses ; inventaire qui a été complété par l’ANSES en 2015.

Aucune expertise n’a été obtenue ce que nous réclamons depuis 2015 et après les nouveaux traitements mis en oeuvre.

La liste de ces substances est impressionnante (82 polluants), autant que leur pouvoir toxique : soude (toxique), aluminium (toxique, perturbateur neurologique, perturbateur cellulaire), fer (perturbateur de la reproduction et de la croissance), arsenic (forte toxicité), vanadium (désordres respiratoires, digestifs, sanguins et neurologiques), titane (toxique pour le plancton), molybdène (perturbateur endocrinien), bore (toxique), chrome (toxique), sélénium (toxique), manganèse (toxique), plomb (saturnisme, perturbateur sanguin, dysfonctionnement reins, foie, système nerveux), cuivre (algicide, atteinte à la base des chaînes marines trophiques), zinc (perturbateur photosynthèse et respiration, cancérigène), antimoine (toxique, possibles lésions hépatiques, rénales et cardiaques), cadmium (maladie Itaï, déformation du squelette), étain (ravageur des parc d’aquaculture), uranium (toxique), lithium (effet possible sur la fonction rénale), nickel (toxique, perturbateur du développement larvaire), cobalt (toxique), argent (toxique sur les stades larvaires), mercure (névropathie, paralysie fonctionnelle, destruction des reins) phénols, 16 hydrocarbures aromatiques polycycliques (forte toxicité, dysfonctionnement cellulaire, cancérigènes), 7 polychlorobiphényles (réduisent l’immunité naturelle, cancérigènes), 7 dioxines et 10 furanes (seuil de toxicité très bas, dysfonctionnement hépatique, nerveux, endocrinien, cancérigènes), 6 composés benzéniques (aberrations chromosomiques, cancérigènes), 1 phtalate (possibles effets sur le foie et les reins, le système reproducteur mâle, possible perturbateur endocrinien), 4 alkylphénols (perturbateurs endocriniens) et 2 polybromodiphenyléthers (perturbateurs endocriniens), 3 organoétains (perturbation de la reproduction et du système immunitaire, malformations morphologiques).

 Sans connaitre les volumes rejetés, ni la concentration de ces produits toxiques, il est difficile de calculer les quantités exactes de polluants rejetés.

L’Agence ANSES a fait état, en 2015, de rejets annuels évalués à 2880 tonnes pour l’aluminium, 26 tonnes pour le vanadium, 9 tonnes pour le titane, 4 tonnes pour l’arsenic et le molybdène, 700 kg pour le chrome, 30 kg pour le plomb, 8 kg pour le cadmium (p. 24 du rapport du 2 février 2015) !

Si ces chiffres sont exacts, on peut se demander quels degrés d’impact peut avoir une telle charge polluante sur la vie marine du Parc national des Calanques.

D’autant plus que, contrairement aux boues rouges plus denses que l’eau de mer, allaient s’accumuler dans les grands fonds, l’effluent décoloré, moins dense que l’eau de mer doit avoir tendance à remonter et à être dispersé en surface sur l’ensemble de la partie marine du PN par le jeu du vent, des vagues et des courants.

Des techniques de marquages colorés ou radioactifs existent et pourraient être utilisées pour vérifier cette hypothèse.

Or d’après le CSIRM, par la voix de son président, il ne semble pas que les études réalisées, souvent sous la houlette d’Alteo, soit vraiment alarmantes.

D’une part, il estime qu’il n’est plus nécessaire d’effectuer des mesures en dehors du champ proche du rejet. Il préconise l’abandon de l’utilisation des moules (caging) comme indicateur de pollution.

Par contre, le rapport conseille cependant de suivre l’évolution des hydrocalcites et de la pollution des sédiments et des perturbations éventuelles de la méiofaune et des peuplements benthiques.

Il précise aussi que l’étude de la contamination des poissons par les rejets d’Alteo n’est guère possible en l’absence de marqueurs spécifiques. Or tous les échantillons de poissons analysés, que ce soit dans la zone du rejet ou dans celle appelée « témoin », sont contaminés, notamment par les métaux lourds, tous, sans exception !

Nous avons d’ailleurs conseillé précédemment à ceux qui consomment du poisson pêché dans les calanques, d’enlever les viscères et la tête où se concentrent le plus les polluants, surtout en ce qui concerne les femmes enceintes et les enfants.

Le désintérêt pour les poissons constitue une lacune importante dans la recherche de l’impact du rejet d’Alteo. Ils occupent, en effet, une place importante, dans les chaines alimentaires, en étant situés le plus souvent au niveau supérieur des prédateurs.

Surement par manque de moyens financiers, le phénomène bien connu de la concentration le long des haines alimentaires et des réseaux trophiques n’a pas été étudié, ni le caractère additif des rejets.

Enfin, il convient de déplorer l’absence de prise en compte, pour de nombreuses espèces, de l’impact sur les formes juvéniles, beaucoup plus sensibles à la pollution que les adultes. IL s’agit notamment des œufs, spores, larves, alevins, etc.

L’oursin comestible en est un bon exemple. Alors que les adultes présentent une assez bonne résistance aux polluants, les larves « pluteus » y sont très sensibles, d’après un nombre important de travaux. L’élimination des pluteus par intoxication tronque le cycle de développement de cet échinoderme, expliquant en partie la raréfaction des oursins.

Pour résumer, le CSIRM constate une amélioration de la « qualité » (sic) du rejet, mais à confirmer, tandis qu’Alteo se déclare satisfait, son rejet ne pollue plus, ou si peu !

Si la charge polluante est aussi négligeable comme le prétend l’industriel, on en vient à se demander pourquoi on continue à injecter ces effluents dans les eaux du Parc national des Calanques !

Les volumes rejetés constituent, en effet, un gaspillage considérable d’eau douce. Leur recyclage pour l’irrigation et la recharge des nappes phréatiques serait une solution particulièrement louable dans le contexte du changement climatique qui est en cours. Cherchez l’erreur !  »

Henry Augier. Président Union Calanques Littoral.

Maître de conférence honoraire. Docteur d’Etat. Professeur honoraire à l’Ecole Nationales des Travaux Publics de l’Etat. Ex directeur du laboratoire de biologie marine fondamentale et appliquée à la faculté des sciences de Marseille-Luminy. Ex responsable des enseignements de la molysmologie (science des pollutions et autres nuisances) à l’université de la Méditerranée. Auteur de nombreux ouvrages sur notre environnement et la destinée de l’humanité.

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